Bob Haller a beau avoir couru le monde entier, ou presque, ces dernières années, il n’avait jamais encore foulé la terre des îles Bermudes, l’archipel bien connu des touristes de l’Amérique du Nord, fort de ses 123 petites îles de corail.
La « World Triathlon Series » de Bermuda, samedi après-midi, lui a certes permis d’apprécier le magnifique paysage des îlots perdus dans l’océan atlantique, mais le parcours de la course a été à l’image de la participation : extrêmement relevé.
Après deux rondes de respectivement 700 et 800 mètres de nage menées tambour battant dans la baie de la capitale Hamilton, l’itinéraire de la course cycliste (10 tours de 4 km) était supérieurement sélectif. A chaque boucle, il y avait une demi-douzaine de virages à angle droit, voire de 180 degrés à maîtriser. Autant dire qu’on n’arrêtait pas de relancer le braquet après chacun des changements de direction, une bonne cinquantaine au total sur les 40 km de course ! Sans parler de la sévère montée de Corscrew Hill ! Les connaisseurs apprécieront…
Et que dire du trajet de la course à pied ? Dans chacun des quatre tours de 2,5 km il fallait encore escalader la très sévère côte !
Bref, le contraire d’une agréable balade romantique…
Comme si les difficultés naturelles ne suffisaient pas, notre compatriote a connu une noire malchance, d’autant plus déprimante qu’il était en mesure de réaliser la plus belle performance de sa carrière. En effet, après les 1500 mètres de nage, qu’il terminait avec seulement 40 secondes de retard sur le meilleur spécialiste, le Sud-Africain Henri Schoeman, vainqueur il y a deux mois de la WTS à Abu Dhabi, il avait réussi à intégrer, sur le parcours cycliste, le peloton des principaux favoris, qui n’avaient pu se résoudre à chasser efficacement derrière une improbable échappée des trois…Norvégiens : Casper Stornes, tout juste 20 ans, No 121 mondial, lequel s’était lancé dès avant le 10e kilomètre dans un cavalier seul pour le moins intrépide, voire suicidaire, pensait-on. Sur la fin des 40 km à effectuer seuls ses compatriotes Blummenfelt (no 3 planétaire) et Iden (no 57 mondial) s’étaient décidés à entamer la chasse.
A deux minutes derrière les fuyards, un peloton d’une trentaine de concurrents suivait tant bien que mal le mouvement, soucieux de garder des réserves pour la course à pied, alors qu’un vent violent balayait la course.
Bob Haller, lui, qui d’après ses propres mots, n’était pas très à l’aise à vélo, se maintenait néanmoins dans les roues des présumés grands noms, et au passage de la ligne d’arrivée à la fin de l’avant-dernier tour, il pointait en 24e position, bien caché au milieu de l’important groupe. Dans sa tête, il spéculait déjà sur une bonne course à pied !
C’est alors que se produit l’incident, qui allait tout foutre à terre. Dans une légère descente, à un km de la fin, le Belge Van Riel et l’Italien Fabian s’accrochaient et se retrouvaient sur la chaussée ; Bob Haller qui les suivait ne pouvait les éviter… Les jambes et les bras recouverts d’écorchures, il essayait encore de se mettre en route pour les 10 km de la course à pied, mais le moral et le physique étaient trop atteints pour insister. Il jetait l’éponge, meurtri dans sa chair autant que dans son esprit…
Le classement de cette course-piège par excellence :
1.Stornes 1.54.47
2.Blummenfelt à 21 ”
3.Iden à 23”
4.Mola (no 1 mondial) à 58”